Je me souviens encore de cette première fois où j’ai vu une femme monter en amazone, silhouette droite, jupe longue parfaitement posée, buste immobile sur un cheval au pas. C’était lors d’un spectacle équestre à Saumur. Tout le monde applaudissait le cheval, moi je ne voyais qu’elle. Ce n’était pas juste élégant, c’était puissant. Ce jour-là, j’ai compris que la monte en amazone n’était pas qu’un détail historique : c’était un langage du corps, une posture sociale et un héritage féminin qui traverse les siècles.
Quelle reine montait en amazone ? Catherine de Médicis, l’impératrice Eugénie, Elisabeth II… Toutes ont incarné, à travers cette manière particulière de monter à cheval, un pouvoir féminin codifié, entre contraintes de bienséance et affirmation silencieuse. De l’Antiquité grecque à la royauté britannique, la monte en amazone a évolué pour devenir un véritable art équestre, ancré dans la tradition mais encore vivant aujourd’hui.
Dans cet article, je vous raconte l’histoire complète de la monte en amazone, ses figures emblématiques, ses significations symboliques et ses techniques spécifiques. Vous découvrirez comment cette pratique, longtemps réservée aux reines et aux dames de cour, a traversé les époques pour revenir sur le devant de la scène, portée par des passionnées qui l’adaptent aux codes équestres contemporains.
Sommaire
Origines et évolution de la monte en amazone
La monte en amazone puise ses racines dans les temps anciens, bâtissant autour de la figure symbolique des Amazones, ces femmes guerrières évoquées aussi bien par Hippocrate que par Aristote dans leurs écrits. Pour les Grecs antiques, la guerrière à cheval représentait déjà un archétype féminin d’exception, en rupture avec les normes de son époque. C’est à travers la légende des Amazones affrontant Héraclès ou s’alliant à Arès que la tradition orale a fait germer l’image de femmes à la fois indépendantes et habiles cavalières.
Plus tard, durant le Moyen Âge, la position des dames à cheval se transforme pour des raisons de bienséance et de sécurité, imposant la monte en amazone comme un moyen permettant à la femme d’accompagner le cavalier ou de participer aux chasses tout en respectant les normes vestimentaires. Les premières selles d’amazone apparaissent alors, améliorant progressivement la stabilité grâce à la fourche (ou sambue) qui maintient la jambe droite le long du cheval.
À la Renaissance, la France affine cette tradition sous l’influence de reines emblématiques, donnant à l’équitation en amazone une aura raffinée et aristocratique. À partir du XIXe siècle, alors que la monte à califourchon se démocratise chez les hommes, les femmes continuent de développer un art équestre distinct, associé au code social et à l’élégance. Cette pratique ne cessera d’évoluer, des traditions royales jusqu’à la place actuelle dans les démonstrations équestres.
Signification culturelle et symbolique de la monte en amazone
La monte en amazone ne se réduit pas à un simple exercice d’équitation. Au fil des époques, elle s’impose comme une manifestation codifiée du pouvoir des élites et du statut social des dames. Monter un cheval en amazone signifiait participer à la vie publique, aux événements mondains et aux grandes chasses royales sans renoncer aux obligations de décence et de raffinement imposées aux femmes.
Le costume d’amazone, avec sa jupe longue ou sa sambue (cette pièce permettant de passer la jambe autour du pommeau de la selle), dessinait une silhouette à la fois gracieuse et résolue. Dans l’Europe d’Ancien Régime, la monte d’amazone incarnait la délicate frontière entre soumission apparente et affirmation silencieuse de la femme, qui pouvait ainsi accompagner activement la cour et démontrer sa propre aisance équestre.
Ce type de position, avec le buste maintenu droit et les jambes posées d’un seul côté du cheval, a aussi inspiré de nombreuses représentations artistiques, toujours chargées d’un sous-texte de maîtrise et de distinction. Aujourd’hui encore, la monte en amazone demeure le symbole d’une tradition féminine forte, s’ouvrant lentement à de nouvelles interprétations par les passionnés d’équitation.
Les techniques et équipements spécifiques de l’équitation en amazone
L’apprentissage de la monte en amazone requiert une précision technique qui la distingue des autres disciplines équestres. La selle d’amazone classique diffère radicalement de la monte à califourchon, puisqu’elle impose de réunir les jambes du même côté du cheval. La fourche principale (ou sambue), et parfois des fourches supplémentaires, stabilisent la cavalière et lui permettent de guider sa monture sans perdre son assiette.
Le choix de la selle se révèle capital. Si la sambue a fait son apparition dès le XVIe siècle, la selle à quatre fourches créée au XIXe siècle en France optimise davantage la sécurité et la liberté de mouvement. La tenue d’amazone, à la fois pratique et esthétique, doit pouvoir couvrir la jambe droite tout en assurant l’élégance impérative aux dames de cour. La jupe d’amazone, taillée pour empêcher toute gêne lors du passage de la jambe autour du pommeau, illustre cette alliance entre confort, utilité et représentation sociale.
Les techniques de monte impliquent une grande mobilité du corps, car il faut maintenir un centre de gravité stable malgré la dissymétrie imposée par la posture. C’est un travail d’équilibre qui mobilise les muscles du buste et des cuisses, exigeant agilité et coordination. Enfin, l’héritage de cette pratique se décline dans les concours contemporains de dressage où la monte en amazone constitue un art à part entière, reconnu et apprécié lors des événements équestres.
Reines célèbres ayant pratiqué la monte en amazone
Catherine de Médicis et la diffusion de la monte en amazone à la cour
Catherine de Médicis, figure majeure de la Renaissance, joue un rôle décisif dans la diffusion de la monte en amazone à la cour de France. Arrivée de Toscane en 1533, elle introduit à la cour française l’usage de la sambue et des selles adaptées, consacrant cette posture comme un art réservé à la noblesse féminine.
Très investie dans les activités de chasse et de représentations, Catherine de Médicis impose un style équestre raffiné. Elle n’hésite pas à modifier les codes italiens pour les adapter au contexte français, élaborant un véritable code de conduite équestre pour les dames de sa suite. La monte en amazone devient ainsi, à travers son action, un marqueur visible du statut royal féminin, accentuant la différence avec la monte à califourchon qui reste l’apanage des hommes.
En inspirant par sa pratique toute une génération de femmes de cour, Catherine de Médicis renforce la symbolique du cheval comme instrument de pouvoir et d’apparat pour la reine, valorisant sa légitimité dans la sphère équestre.
L’impératrice Eugénie et la tradition équestre féminine au XIXe siècle
Au XIXe siècle, l’impératrice Eugénie s’impose comme une des grandes ambassadrices de l’équitation en amazone. Passionnée par le cheval, elle impose lors des grandes cérémonies impériales le raffinement d’une posture étudiée, magnifiée par le costume d’amazone caractéristique de son époque.
Sa présence aux événements équestres, notamment lors des démonstrations de dressage et des présentations officielles, donne une visibilité inédite à la monte en amazone. Sous son impulsion, ce type d’équitation se démocratise auprès de l’aristocratie européenne, et la France devient un centre incontournable de la tradition amazone. L’impératrice Eugénie incarne, par son style et son engagement, le parfait équilibre entre exigence technique et ambitions politiques, maniant le cheval en amazone comme un prolongement de sa fonction et de son image de souveraine.
Elisabeth II et la persistance de la monte en amazone dans la royauté britannique
La reine Elisabeth II a marqué l’histoire récente par son attachement à la monte en amazone, perpétuant une tradition britannique de l’équitation royale. Durant toute sa jeunesse et lors de certaines cérémonies, elle opte délibérément pour cette posture emblématique lors des activités officielles et privées.
L’apparition d’Elisabeth II, posée avec majesté sur un cheval, incarne la continuité d’une tradition qui traverse les âges. Portant fièrement l’uniforme d’apparat ou l’élégant costume amazone, elle se fait l’héritière d’une longue lignée de souveraines associant élégance, monde équestre et symbolique du pouvoir. Sa posture sur le cheval, les jambes du même côté, rappelle que la maîtrise de l’équitation en amazone est bien plus qu’un art de vivre : c’est encore une affirmation du rang et du rôle politique de la reine.
Autres femmes royales et figures historiques associées à la monte en amazone
Au-delà des reines phares comme Catherine de Médicis ou Elisabeth II, d’autres femmes historiques se sont distinguées par leur pratique de la monte en amazone. Parmi elles, on peut évoquer Catherine II de Russie, fameuse pour ses audacieuses sorties à cheval, revendiquant la place de la dame cavalière dans une cour dominée par les hommes. Elle fit même évoluer la selle d’amazone pour gagner en stabilité lors de ses longues inspections militaires.
On peut également citer la reine Victoria, qui, bien que plus discrète, ne manqua pas de se montrer en costume d’amazone lors de chasses symboliques et d’apparitions protocolaires. Plusieurs princesses d’Europe centrale et du Nord, dans les familles royales suédoises et danoises, ont également perpétué la tradition au fil des siècles.
De nombreuses Amazones historiques continuent d’inspirer des associations telles que l’Association des Amazones de France, qui s’emploie aujourd’hui à transmettre cet héritage à travers des démonstrations et des concours réservés aux amateurs d’équitation féminine.
Représentations artistiques et iconiques des reines montant en amazone
La monte en amazone a donné naissance à une riche iconographie, notamment dans la peinture, la sculpture et la photographie. Les portraits de reine à cheval, vêtues du costume d’amazone, abondent dans les collections royales d’Europe. Les fresques de la Renaissance offrent des scènes de Catherine de Médicis, majestueusement posée sur sa monture, souvent accompagnée de ses dames d’honneur, sublimant la tenue et la selle spécifiques à la tradition.
Aux XIXe et XXe siècles, la photographie immortalise l’impératrice Eugénie ou Elisabeth II lors de grandes parades équestres. Statues érigées dans les jardins royaux, tapisseries historiques de France ou encore numismatique, témoignent de la place centrale accordée à l’amazone dans l’héritage féminin européen.
Certaines œuvres rendent compte de l’élégance et de la maitrise technique requise, tandis que d’autres insistent sur la dimension sociale et politique. Le choix du cheval, la coupe des jupes, la mariée couleur de la selle : chaque détail artistique retranscrit le rang, la personnalité et la force de la reine en tant qu’emblème féminin. Ces images perdurent aujourd’hui dans des musées dédiés à l’histoire de l’équitation et continuent d’inspirer de nouvelles générations de cavalières.
Héritage et renouveau de la monte en amazone dans le monde équestre contemporain
Si la monte en amazone a longtemps appartenu à la sphère aristocratique, elle connaît ces dernières décennies un regain d’intérêt. De nombreux événements équestres en France et en Europe mettent à l’honneur ce travail technique lors de démonstrations et d’épreuves de dressage spécifiques.
Des associations comme l’Association des Amazones de France jouent un rôle clé dans la transmission : stages, initiations, championnats de dressage, tout est mis en œuvre pour valoriser et adapter la pratique aux besoins contemporains. Les costumes, bien qu’inspirés de la tradition, sont revisités pour offrir confort et sécurité, tandis que la selle d’amazone bénéficie désormais de matériaux modernes.
Aujourd’hui, la monte en amazone s’affirme comme une passion choisie, célébrant à la fois les prouesses des Amazones d’hier et la liberté des femmes sur leurs chevaux. Dans un monde équestre ouvert à la mixité des genres, elle rappelle que la maîtrise de l’art équestre sait s’adapter, tout en perpétuant les valeurs et le raffinement transmis par les figures royales du passé.
FAQ
Quelles reines célèbres sont connues pour avoir monté en amazone sur un cheval ?
Parmi les reines emblématiques, Catherine de Médicis, l’impératrice Eugénie et Elisabeth II sont trois figures marquantes reconnues pour leur maîtrise de la monte en amazone, tant lors des cérémonies que des chasses et autres activités officielles.
Pourquoi les reines montaient-elles en amazone et non à califourchon ?
La monte en amazone permettait aux dames de respecter les normes de décence tout en participant à la vie de cour et aux chasses. Cette posture symbolisait élégance et rang tout en exprimant le pouvoir de la femme à cheval.
Existe-t-il des représentations artistiques de reines montant en amazone ?
Oui, de nombreuses œuvres picturales, sculptures et photographies, telles que les portraits de Catherine de Médicis ou l’impératrice Eugénie à cheval, perpétuent la mémoire de ces figures royales pratiquant la monte en amazone.
La monte en amazone est-elle encore pratiquée aujourd’hui ?
Oui, elle bénéficie d’un renouveau dans les concours équestres, les démonstrations et grâce à des associations qui en perpétuent la tradition et la modernisent pour les passionnés d’équitation contemporaine.
Qu’est-ce qui distingue techniquement la selle d’amazone ?
La selle d’amazone possède une sambue (fourche) permettant de garantir la stabilité de la cavalière, avec les deux jambes du même côté du cheval. Ce design assure élégance et sécurité pour la monte spécifique des Amazones.