Je me souviens de la première fois où j’ai accompagné un adolescent en difficulté lors d’une séance d’équithérapie. Il n’avait pas prononcé un mot en arrivant, regardait ses chaussures comme si le monde s’y était replié. Mais quand il s’est approché du cheval, quelque chose a changé. L’animal l’a simplement regardé, sans attente, sans jugement. Et le garçon a levé les yeux. Ce jour-là, j’ai compris la force silencieuse de la médiation équine.
L’équithérapie n’est pas une simple activité autour du cheval. C’est un soin, un accompagnement thérapeutique fondé sur la relation tripartite entre le patient, le professionnel et l’animal. Reconnue en France depuis plusieurs décennies, cette approche mobilise le cheval comme médiateur pour travailler les émotions, le corps, la communication et la confiance en soi.
Dans cet article, je vous propose de plonger dans les principes, les objectifs et le cadre de l’équithérapie, en explorant ses origines, son fonctionnement concret, les publics concernés, les différences avec l’hippothérapie, mais aussi les précautions éthiques à respecter. Une démarche sensible et exigeante, où chaque séance peut devenir un moment de transformation profonde.
Sommaire
Définition de l’équithérapie selon les sources officielles
L’équithérapie trouve sa définition officielle à travers les institutions de référence, comme la Société Française d’Equithérapie. Selon cette société, il s’agit d’un soin psychique médiatisé par le cheval et dispensé à une personne dans sa globalité, que ce soit sur le plan psychique ou corporel. Cette pratique s’inscrit dans le champ des soins non conventionnels, bien qu’elle soit de plus en plus reconnue et intégrée comme complémentaire à d’autres approches thérapeutiques.
L’équithérapie ne se limite pas à l’activité équestre classique ni à la simple présence de l’animal : elle mobilise la relation tripartite entre le patient, l’équithérapeute et le cheval. Ce travail repose sur la capacité de l’animal à jouer le rôle de médiateur dans la prise en charge de certaines difficultés psychiques ou physiques, par un ensemble d’activités adaptées à chaque individu. Notons que l’équithérapie a pour but de soigner, d’accompagner, ou de permettre un développement personnel par la médiation équine plutôt que de se substituer à la médecine ou à la psychothérapie conventionnelles. À partir de cette définition, on comprend que le cadre de la pratique implique un thérapeute formé aux techniques de soin, travaillant conjointement avec le cheval pour favoriser le bien-être du patient.

En France, la pratique est encadrée, même si le statut de l’équithérapeute et les modalités de formation évoluent régulièrement pour répondre à la demande croissante et au besoin de sécurité des patients.
Origines et historique de l’équithérapie
L’équithérapie puise ses racines dans l’histoire de la relation entre l’humain et le cheval. Déjà dans la Grèce antique, des philosophes comme Hippocrate faisaient allusion à la vertu thérapeutique de l’équitation pour renforcer le corps et l’équilibre moral. Toutefois, l’apparition de cette discipline dans sa dimension soignante moderne remonte à la seconde moitié du XXe siècle, particulièrement en Europe du Nord puis en France.
Après la Seconde Guerre mondiale, la rééducation fonctionnelle par le cheval se généralise chez les blessés civils et militaires. Un cas emblématique est celui de Liz Hartel, une cavalière suédoise atteinte de poliomyélite qui remporte une médaille olympique en équitation grâce à la rééducation avec les chevaux. Ce type de succès populaire inspire le développement des premières structures de médiation équine.
En France, les années 1970 voient naître les premiers centres spécialisés et la multiplication des études universitaires. L’intégration de l’équithérapie dans certains parcours médicaux ou paramédicaux se fait progressivement. Au fil des décennies, plusieurs thèses et articles scientifiques contribuent à préciser le cadre et les objectifs : la thérapie avec le cheval s’enrichit alors à la fois d’approches psychomotrices, psychologiques et même éducatives.
Ce retour historique montre que l’engouement pour l’équithérapie ne cesse de grandir, porté par le besoin croissant d’approches complémentaires en santé mentale et physique.
Principes fondamentaux de la médiation équine
Au cœur de l’équithérapie, la valeur du cheval comme “miroir émotionnel” du patient est essentielle. En effet, l’animal réagit en temps réel aux émotions humaines, devenant ainsi un partenaire privilégié pour explorer la communication non verbale et la confiance. La relation créée forme, à chaque séance, un espace sécurisé et stimulant où le patient peut modifier ses réponses face au stress ou aux troubles du comportement.
Le travail thérapeutique repose sur différents axes : l’investissement du corps grâce au mouvement du cheval (stimulation sensoriel et proprioceptive), l’élaboration psychique encouragée par la présence rassurante du partenaire équin, et la construction d’une confiance en soi progressive. Le thérapeute adapte chaque séance en fonction des besoins mais veille toujours à ce que la médiation par le cheval renforce l’autonomie, la gestion des émotions et la capacité de communication.
L’un des fondements majeurs réside dans la triade thérapeute–cheval–patient. Chacun de ces membres joue un rôle unique et complémentaire : le cheval, en tant qu’être sensible, n’impose aucun jugement, ce qui favorise l’expression authentique et la progression psycho-affective du patient.
Objectifs et bienfaits de l’équithérapie
L’équithérapie poursuit plusieurs objectifs fondamentaux, adaptés à chaque individu. L’amélioration de la confiance en soi arrive fréquemment en tête, particulièrement pour les enfants ou adolescents en situation de troubles du comportement ou d’anxiété. La stimulation motrice et la réadaptation du corps participent aussi au processus : apprendre à guider un cheval, sentir son mouvement, travailler l’équilibre ou la coordination sont autant de leviers pour le développement personnel.
Plusieurs études françaises rapportent des avances sur le plan émotionnel : le contact privilégié avec l’animal permet d’apaiser certains états comme la dépression ou le retrait social. Un exemple concret est celui de Thomas, 12 ans, qui, grâce à huit séances d’équithérapie, apprend progressivement à parler de ses peurs et à s’ouvrir à son entourage familial.

Aux dimensions psychiques s’ajoutent les bénéfices physiques : coordination, tonus musculaire, prise de conscience corporelle. À terme, cette approche favorise l’autonomisation, le sentiment de sécurité et une meilleure qualité de vie chez de nombreux patients.
Différences entre équithérapie, hippothérapie et autres médiations animales
Il est essentiel de ne pas confondre équithérapie et hippothérapie. L’équithérapie se concentre avant tout sur le volet psychique, affectif et relationnel par l’utilisation du cheval comme médiateur. Elle s’adresse principalement à des problématiques d’ordre psychologique, relationnel ou social, et requiert l’intervention d’un thérapeute formé.
L’hippothérapie, quant à elle, est habituellement pratiquée par des professionnels paramédicaux (ergothérapeutes, kinésithérapeutes) et vise la rééducation physique, comme la tonification musculaire ou la correction posturale. La distinction est également notable avec d’autres médiations animales, telles que la zoothérapie avec des chiens, qui privilégient d’autres types de relation et d’objectifs spécifiques.
Les activités d’équitation adaptée relèvent d’une démarche sportive, à visée ludique ou éducative, et non thérapeutique. Seule l’équithérapie se définit comme un soin psychique médiatisé par le cheval, où la relation entre le patient, le professionnel et l’animal est centrale et orchestrée dès la première séance.
Publics concernés et indications de l’équithérapie
L’équithérapie s’adresse à une diversité de publics. Les enfants souffrant de troubles neurodéveloppementaux, comme l’autisme, trouvent dans la relation avec le cheval une possibilité de contact différent, où la pression sociale est allégée. Pour les adolescents ayant des difficultés scolaires ou relationnelles, la médiation équine propose une approche respectueuse pour reconstruire une confiance ébranlée.
Les adultes peuvent bénéficier de l’équithérapie en cas de dépression, d’anxiété chronique, de burn-out ou à l’occasion d’une transition difficile dans la vie. Par ailleurs, des centres spécialisés accueillent des personnes en situation de handicap moteur, où l’interface avec le cheval offre un espace de rééducation et de renforcement corporel.
Un nouveau champ d’application émerge avec les familles et les groupes. Certaines structures en France proposent des séances collectives pour travailler la cohésion familiale ou la dynamique de groupe. Enfin, les indications sont décidées par l’équithérapeute en lien avec le corps médical, afin d’assurer la pertinence et la sécurité de la proposition de prise en charge.
La capacité d’adaptation de cette démarche permet d’accompagner une large variété de troubles tout en plaçant le bien-être et la singularité du patient au centre du processus.
Déroulement d’une séance d’équithérapie
Une séance type d’équithérapie se déroule généralement dans un cadre calme et sécurisé, au sein d’un centre équestre ou d’un espace dédié. L’objectif premier est d’établir une alliance de confiance entre le patient, le thérapeute et le cheval. Après un temps d’accueil, la séance peut comporter différentes étapes : observation du cheval, pansage (soin et toilettage), exercices au sol, puis, selon les besoins et capacités, travail à cheval.
Durant ces moments, le thérapeute guide, observe et adapte, laissant place à la spontanéité du cheval et aux réactions du patient. Parfois, une séance se construit autour du contact tactile ou du simple partage d’espace, important pour les personnes présentant des troubles sensoriels ou de communication.
Un exemple marquant concerne la prise en charge d’un adolescent souffrant d’anxiété : les premières séances sont centrées sur le pansage, le dialogue avec l’animal et la découverte progressive du mouvement équestre. L’évolution est minutieusement documentée par le professionnel afin de garantir la pertinence du suivi.
La relation tripartite se construit ainsi, séance après séance, ouvrant la voie à des progrès significatifs tant sur le plan psychique que corporel.
Professionnels, formation et cadre légal de l’équithérapie
Les équithérapeutes sont des professionnels issus de formations variées : psychologie, psychomotricité, éducation spécialisée, ou cursus médico-social. En France, si la profession n’est pas encore complètement réglementée par un code dédié, plusieurs organismes certifiants (dont la Société Française d’Equithérapie) posent des exigences élevées en matière de formation continue et d’éthique.
L’accès au métier suppose un solide bagage dans l’accompagnement, la connaissance du cheval et les techniques thérapeutiques adaptées. Certaines universités françaises proposent des modules spécialisés, qui combinent enseignement théorique, pratique équestre et stages en structure. À titre illustratif, l’université de Paris offre un diplôme universitaire en médiation équine depuis quelques années, témoignant d’un intérêt accru pour ce champ pluridisciplinaire.
Le cadre légal est en constant ajustement afin de garantir la sécurité et la qualité des soins prodigués. Toute prise en charge se doit de s’inscrire dans une démarche déontologique claire, protégeant chaque patient ainsi que le cheval, qui fait partie intégrante du processus thérapeutique.
L’importance de la formation et du respect des règles d’encadrement est centrale pour pérenniser la pratique et garantir ses bénéfices auprès du public.
Limites, risques et considérations éthiques de l’équithérapie
Si l’équithérapie séduit par son caractère innovant et ses résultats concrets, elle présente également certaines limites. D’abord, elle ne saurait se substituer à une prise en charge médicale classique lors de pathologies sévères ou nécessitant des traitements spécialisés. Les risques sont généralement faibles, mais l’interaction avec un cheval impose une vigilance constante, car l’animal reste imprévisible et requiert une maîtrise technique de la situation.
Sur le plan éthique, il apparaît fondamental de veiller au bien-être du cheval utilisé en séance. Le respect des besoins et limites de l’animal, la variété des modes de travail, mais aussi la formation à l’observation des signaux de fatigue ou d’inconfort, sont des piliers du code de conduite des professionnels responsables.
Enfin, la question de l’indication est centrale : l’équithérapie ne convient pas à tous les patients ni à toutes les problématiques. Certains troubles (phobies sévères du cheval, allergies, incapacité motrice majeure) limitent l’accès à cette approche.
Les praticiens s’appuient alors sur un accompagnement pluri-professionnel, garantissant que la prise en charge reste adaptée et sécurisée pour chaque personne concernée, comme pour l’animal. Cette vigilance éthique et scientifique contribue à asseoir la légitimité grandissante de l’équithérapie en France, en 2025.
FAQ
Qu’est-ce que l’équithérapie ?
L’équithérapie est un soin psychique et corporel utilisant la médiation avec le cheval, guidé par un thérapeute formé, visant à accompagner le patient dans ses difficultés émotionnelles, physiques ou relationnelles.
À qui s’adresse l’équithérapie ?
Elle concerne des enfants, adolescents ou adultes touchés par différents troubles : autisme, troubles du comportement, anxiété, dépression, difficultés relationnelles, handicaps physiques, mais aussi toute personne cherchant un développement personnel par le biais du cheval.
Comment se déroule une séance ?
Chaque séance débute par un temps d’accueil, suivi d’activités avec le cheval (pansage, exercices à pied, éventuellement montée à cheval), sous la supervision d’un professionnel, dans un cadre sécurisé et respectueux.
Quelle différence entre équithérapie et hippothérapie ?
L’équithérapie vise principalement le volet psychique et relationnel, alors que l’hippothérapie s’adresse surtout à la rééducation du corps, la pratique étant encadrée par des professionnels de santé paramédicaux.
Quels sont les bénéfices reconnus de l’équithérapie ?
Parmi les principaux effets, on observe une amélioration de la confiance en soi, du bien-être émotionnel, de la communication, ainsi qu’un renforcement physique et une qualité de vie accrue pour de nombreux patients.